En farfouillant sur le Web ces derniers jours, je suis tombé sur le rapport de la chambre territoriale des comptes sur "la gestion de la politique de l'éducation de la Nouvelle-Calédonie".
Assez long à lire puisqu'il fait 154 pages mais très instructif et met clairement en évidence les insuffisances perspectives d'évolution du système.
Ce rapport est disponible sur le site de la cour des comptes (si vous souhaitez être un citoyen avisé et averti, je vous conseille fortement de lire les rapports de la cour des comptes).
Au vu des recommandations, cela me semble clairement être la feuille de route du nouveau vice-recteur de la Nouvelle-Calédonie Jean-Charles Ringard-Flament qui succède à Patrick Dion.
Le rapport part d'un constat plutôt alertant améliorable pour établir des recommandations.
Une des problématiques soulevée par ce rapport concerne la gouvernance au vu de l'éclatement des responsabilités (DENC (gouvernement), vice-rectorat, provinces). En l'état, le rapport indique que, suite au transfert, "le rôle de pilote du système éducatif est entièrement dévolu à la Nouvelle-Calédonie" mais aussi "Avant le transfert, l’éclatement des responsabilités avait pour conséquence qu’aucun compte rendu centralisé primaire/secondaire n’était effectué". On ne peut donc reprocher la genèse de cet état de fait à la Nouvelle-Calédonie. A mon avis, l'état doit nécessairement assumer son rôle d'accompagnant dans le transfert effectif de l'éducation. Il ne suffit pas d'injecter seulement des moyens via, par exemple, la M.A.D.G.G (Mise à Disposition Globale et Gratuite - convention du 18 octobre 2011) en pensant que le transfert effectif et ses modalités en découleront. Selon moi l'état assume bien et totalement son obligation de moyen mais a largement plus de difficultés à assumer le rôle encadré par la convention du 20 septembre 2010 qui prévoyait "l'accompagnement de l’État au transfert et à l'exercice des compétences transférées". Les conventions existent bel et bien mais il serait nécessaire d'assister la Nouvelle-Calédonie concernant la gouvernance ainsi que dans les outils de gestion associée au pilotage opérationnel et de gestion.
Je retiens aussi qu'il évoque l'absence de lien informatique entre le primaire et le secondaire ce que j'avais déjà fortement souligné au cours du projet éducatif calédonien. Si l'on veut un système cohérent, pérenne et efficace, il faudrait avoir un système d'information global et unifié, un "socle commun" informatique. L'on ne saurait effectuer des projets et initiatives épars non transverses qui ne permettront pas, in fine, d'atteindre l'objectif d'un système d'information cohérent (EducaSud pour la province Sud, applications nationales du vice-rectorat, applications locales de la DENC).
Le rapport propose une optimisation des moyens par le biais d'un regroupement des services par fonction analogue en lieu et place d'une dichotomie public / privé.
Les autres grands enjeux de l'éducation sont spécifiés dans ce rapport, qui reprend, en partie, ceux identifiés dans le projet éducatif calédonien : prévention du décrochage et contrôle de l'absentéisme, réduction des inégalités, mise en place d'indicateurs de performances des établissements, prévention des actes de violence et prise en charge des élèves en difficulté, etc.
En lisant cela, j'esquisse un rictus faussement hilare. J’ai travaillé sur divers projets dont, notamment, un logiciel pour le signalement et le suivi des absentéismes de longue durée dans les établissements public d’enseignements (SignAbs) dont j’ai assuré l’ensemble de la conduite de projet jusqu’au développement, un logiciel pour le signalement et le suivi des faits de violence (CIVINC) ainsi qu'un outil de pilotage sous Business Objects pour le suivi de la performance des établissements . Ces différents travaux sont les plus emblématiques (et non exhaustifs) de mon travail dans le sens où ils ont bénéficié d’une couverture médiatique ou d’un fort retentissement au sein de notre administration, CIVINC a été évoqué par M. le Vice-recteur, sur NC1ère, dans l’émission « sans détour » du 30 avril 2015 consacré au sujet des violences scolaires et SIGNABS dans le documentaire « les chemins de traverse » consacré au décrochage scolaire et diffusé le mardi 6 octobre 2015 toujours sur NC1ère. Les tableaux de bord pour le suivi de la performance des établissements furent souvent évoqués par M. le Vice-recteur Patrick Dion et, notamment, lors du séminaire des contributeurs au projet éducatif calédonien auquel j’ai participé. Je n'évoque pas non plus le fait que j'ai résolu, à mon arrivée, un incident de piratage du serveur Web du vice-rectorat (site "défacé" avec des pubs pour le viagra) qui durait depuis des mois et qui aurait pu être beaucoup plus grave si personne n'était intervenu puisque le pirate avait le contrôle de ce serveur.
Pourquoi ce rictus faussement hilare ? Parce qu'étant né en Nouvelle-Calédonie en 1984 (c'est bien écrit sur mon passeport, mes demandes pour récupérer mon acte de naissance passent par la mairie de Nouméa sans oublier que mon fils est né aussi à Nouméa), après avoir été quelque peu influencé par mon administration (ça n'engage que moi, c'est subjectif mais ce sont eux qui m'ont parlé du CIMM en me disant qu'ils étaient très content de mon travail et qu'ils voulaient me garder), j'avais fait la demande au vice-rectorat de pérenniser ma situation pour m'installer localement, durablement via la procédure administrative idoine (très lourde comme souvent dans l'administration, procédure qui passe par l'administration d'origine, le gouvernement, le haussaire et finalement la ministre, si un élément de la chaîne émet un avis défavorable, à fortiori celui du début, il n'y a aucune chance que vous ayez finalement un avis favorable de la ministre) : le transfert du Centre des Intérêts Matériels et Moraux (CIMM) qui m'a été refusé sans autre forme de procès (avis défavorable de ma propre administration !!!???) => sans commentaires (sur le fond!) ! En aparté, sur la forme, ce serait bien de cadrer juridiquement cette procédure, l'absence de règles juridiques rend cela totalement flou et ne respecte pas, à mon sens, le principe d’égalité. L'idéal serait des règles d'attribution claires classées par priorité (natif, scolarité, enfants, ascendants, propriétés sur place, etc.) qui, en fonction justement de ces priorités, garantissent ou non l'obtention de ce transfert. Il y a sans doute une volonté aussi de mettre fin au CIMM car, comme le précise clairement le rapport : "(...) Les adjoints administratifs peuvent relever du cadre d’État ou du cadre territorial. Il n’est pas nécessaire de laisser subsister une dualité de statut. Il convient alors de proposer aux agents un transfert dans le corps territorial (...)". Ainsi, l'alternative serait de proposer d'intégrer le cadre territorial, enfin bref trouver des solutions concrètes si, toutefois, l'agent en question donne entière satisfaction.
Quand je vois la "valeur" de mon travail reconnu aussi bien au niveau médiatique (émission sur NC1ère), que dans un rapport comme celui de la cour des comptes qui parle de CIVINC que j'ai mis en place de bout en bout ainsi que du tableau de bord des établissements, je ne peux m'empêcher de me dire que c'est un beau gâchis dommage. Bon l'histoire finit bien (même très bien) car j'ai trouvé un poste à responsabilités dans une autre administration qui me permet justement d'avoir une situation pérenne en Nouvelle-Calédonie, métier qui n'a plus rien à voir avec l'éducation. Je vous épargne la galère les subtiles difficultés administratives que j'ai dû affronter pour y arriver puisque, le vice-rectorat, paradoxalement souverainement après avoir refusé mon dossier de CIMM, a tout fait, au niveau administratif, pour m'empêcher de partir avant la fin de ma mise à disposition, message que je simplifie, en forçant à peine beaucoup le trait, à : "on ne veut pas que tu restes" mais "on ne veut pas que tu partes"... Logique, non ?
Revenons à l'essentiel, le texte ci-dessous reprend tout ou partie les éléments synthétiques de ce rapport.
La dépense d’éducation représente la plus importante dépense publique et s’élevait en 2010 à près de 100 Mds F CFP soit 12% du PIB du territoire (contre un peu moins de 5 % pour la métropole).
Le nombre de bacheliers toutes filières confondues est passé de 608 en 1989 à 2 157 en 2009, le nombre de calédoniens réussissant les concours nationaux de l’enseignement secondaire est en forte augmentation.
La performance globale du système éducatif calédonien est décevante au regard du niveau général des élèves et de la réduction des inégalités sociales et territoriales.
En 2009, le pourcentage de la population de 14 ans et plus sans diplôme était de 41% en province des Iles, de 45 % en province Nord contre 23% en province Sud.
La proportion d’une classe d’âge atteignant le bac a atteint 55% en 2013 contre 74% en métropole. Globalement, le système éducatif calédonien apparaît peu performant vis-à-vis des élèves en difficultés, lesquels deviennent ensuite de jeunes adultes en difficultés.
Ainsi, 13,5 % des jeunes se présentant chaque année à la journée défense et citoyenneté sont en situation de « difficultés sévères » vis-à-vis de la lecture, à comparer au taux métropolitain de 4,9 %.
Avec les « faibles lecteurs », le taux des personnes en difficultés monte à 33 %.
Un suivi statistique insuffisant
Par exemple, au plan quantitatif, les moyens non enseignants du secteur primaire ne sont pas comptabilisés. Il n’y pas de continuité entre les bases élèves provinciales du primaire et celle, territoriale, du secondaire.
Cette absence de lien informatique entre le primaire et le secondaire nécessite une ressaisie de l’ensemble des données des élèves entrant en sixième ce qui représente une perte de temps, de moyens et d’efficacité.
Sur le plan financier, la dépense d’éducation n’est pas connue. Cela nécessiterait de centraliser les dépenses des communes, des provinces, du territoire et de l’Etat. Or cette centralisation n’est pas assurée hormis par l’Isee qui réalise une enquête environ tous les
5 ans, pour laquelle les dépenses des communes et des provinces ne sont a priori pas toutes enregistrées du fait d’un défaut de saisie à l’échelon de ces collectivités.
Un pilotage à renforcer
L’enjeu est la mise en place d’indicateurs chiffrés, suivis, ciblés et partagés comme outils de pilotage et de dialogue de gestion entre les établissements et l’administration.
Au final, à l’image du travail déjà fourni pour la gestion matérielle des bâtiments scolaires, le pilotage opérationnel doit nettement progresser ce qui suppose de travailler sur deux chantiers ; celui des applicatifs informatiques à visée opérationnelle ou de reporting de l’activité et de la performance et celui des indicateurs et des objectifs opérationnels pertinents pour les établissements primaires et secondaires.
Une répartition des responsabilités centrée sur la Nouvelle-Calédonie
Le transfert a eu pour principal effet de réunir sous la responsabilité d’une collectivité unique, la Nouvelle-Calédonie, les secteurs primaire et secondaire du public comme du privé. De plus, grâce au système du service unique, ce sont les mêmes personnes et les mêmes services qui exercent les missions de la Nouvelle-Calédonie et celles restées à l’Etat. Il n’y a donc pas de césure des moyens consacrés aux missions de ces deux acteurs majeurs.
Le droit calédonien de l’éducation
Au fil du temps, les textes en matière d’éducation en Nouvelle-Calédonie se sont accumulés dans un certain désordre. Le droit de l’éducation est la base et le guide de l’activité des services et du contrôle de leur performance. Son manque de lisibilité est un obstacle à un pilotage performant. Par une modification de la loi organique du 3 août 2009, ont été introduits ou modifiés les articles 55-1, 56, 56-1, 56-2, 59, 59-1 et 59-2 de la loi organique. Ils ont réglé les modalités du transfert des compétences intervenu au 1 er janvier 2012. L’article 215 de la loi fixe que les langues kanak sont reconnues comme langues d'enseignement et de culture.
L’Etat continue, dans le cadre de ses compétences, de produire des textes applicables en Nouvelle-Calédonie. Les concours, les examens, les programmes et le contrôle pédagogique sont les principaux domaines concernés.
Pour régler les détails du transfert, il avait été décidé que l’Etat et la Nouvelle-Calédonie procèderaient par des conventions. Une première convention de portée générale a été signée le 20 septembre 2010 entre la Nouvelle-Calédonie et l’Etat. Elle prévoit un accompagnement de l’Etat au transfert et à l’exercice des compétences transférées et une ou des conventions spécifiques pour chacun des transferts devant avoir lieu.
Une mission conduite en Nouvelle-Calédonie par l’inspection générale de l’éducation nationale en mai 2011 a permis de finaliser les conventions spécifiques, relatives au transfert de l’enseignement.
Quatre conventions ont été signées le 18 octobre 2011. Une convention organise la mise à disposition globale et gratuite à la Nouvelle-Calédonie des personnels transférés qui relevaient précédemment de l’Etat. Une porte sur le transfert de l’enseignement agricole.
Une troisième concerne le transfert des classes d’enseignement supérieur des lycées. Une dernière fixe les conditions de la mise en place d’un service commun à l’Etat et à la Nouvelle-Calédonie dénommé service unique et chargé de piloter les compétences exercées par l’Etat et celles exercées par la Nouvelle-Calédonie dans le domaine de l’éducation. La durée des quatre conventions a été calquée sur celle de la convention de mise à disposition globale et gratuite. Or celle-ci n’est pas bornée dans le temps
L’article 25 de la loi du pays du janvier 2012 portant organisation de l’enseignement primaire en Nouvelle-Calédonie se réfère au code de l’éducation pour ses parties législatives et règlementaires.
Le code devrait donc continuer à être actualisé sur le site juridoc.nc ce qui n’est plus le cas depuis 2011.
La chambre observe donc que, tout en travaillant à l’élaboration d’un projet éducatif global, la Nouvelle-Calédonie doit assurer la codification du droit applicable. Un chargé de mission codification pourrait être affecté en tout ou partie à cette mission.
Rappel d’obligation juridique n°1
En application du principe d’accessibilité et d’intelligibilité du droit, la chambre demande que la Nouvelle-Calédonie tienne à jour et rende ainsi accessible le droit de l’éducation dans un code calédonien de l’éducation.
Le président du « gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a annoncé dans la déclaration de politique générale du 13 avril 2015 que des travaux sont engagés en ce sens. ».
Les enjeux d’organisation et d’articulation
A l’issue des transferts intervenus en 2012, les responsabilités en matière d’éducation sont fragmentées tout en relevant de la Nouvelle-Calédonie pour le pilotage d’ensemble. Les provinces mènent leurs actions en toute autonomie, avec, par exemple, les relais d’animation périscolaire et d’information – les RAPI – les maisons familiales et rurales - les MFR - en province Nord ou les internats d’excellence en province Sud. Le rôle des internats est en général un sujet important.
La notation du contrôle pédagogique de la Nouvelle-Calédonie (direction des enseignements) concernant les maîtres du primaire n’est pas toujours prise en compte par la province, employeur du maître concerné.
La politique de dérogation à la zone d’inscription géographique dans le primaire est un autre exemple de gestion cloisonnée qui impacte la performance globale du système.Coordonner les acteurs est donc devenu une nécessité plus pressante encore depuis 2012
Recommandation n°1
La chambre recommande qu’une concertation institutionnalisée entre les acteurs de l’éducation soit mise en place à l’échelon territorial et provincial. La Nouvelle-Calédonie indique en réponse que le comité ICARE a été remis en activité avec une réunion le 5 décembre 2014 et qu’il sera adapté au nouveau partage des compétences.
Les réorganisations internes
Avant le transfert, il existait une séparation très nette entre les services en charge de l’éducation secondaire et du primaire privé dirigés par l’Etat et ceux de la Nouvelle-Calédonie et des provinces en charge du secteur primaire public.
Compétences non transférées mises à part, le transfert a placé cet ensemble de services sous la direction de la Nouvelle-Calédonie. L’organisation des administrations centrales jusqu’ici séparées doit évoluer et les établissements doivent être dotés d’un nouveau
statut. En 1999, les compétences sur les programmes et le contrôle pédagogique du premier degré ont été transférées à la Nouvelle-Calédonie en application de la loi organique du 19 mars 1999 (alinéa 28 de l’article 22). La Nouvelle-Calédonie avait alors créé la direction de l’enseignement de la Nouvelle-Calédonie (DENC) pour gérer ses compétences dans le secteur primaire public. Le noyau de cette direction était formé des services de l’Etat chargés de l’enseignement public du premier degré. D’abord installée dans les mêmes locaux que le vice-rectorat, la direction a pris ensuite ses propres locaux. Le vice-rectorat qui relevait exclusivement de l’Etat a continué d’administrer le reste du secteur éducatif. Une convention du 18 octobre 2011 entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie fixe que l’ancien vice-rectorat forme un « service unique » composé des services transférés et non transférés. Aux termes de la convention du 18 octobre 2011 déjà citée, le « vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie » désigne le service unique formé des services transférés et des
services non transférés. Cependant, aux termes d’un arrêté du 9 janvier 2012 le « vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie » désigne uniquement les services transférés. La DENC, autonome depuis 2000, ne fait pour le moment pas partie du vice-rectorat de la
Nouvelle-Calédonie.
La chambre estime que le regroupement des services de la DENC avec ceux du vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie est nécessaire depuis le transfert intervenu en 2012.
Dans sa réponse, la Nouvelle-Calédonie met en avant qu’une « telle restructuration doit être conduite avec méthode et en lien avec le projet éducatif. Il faut définir les objectifs à atteindre à travers cette éventuelle restructuration, si l’on ne veut pas susciter toute une série de réactions (résistance au changement chez les personnels concernés, etc.). Elle précise qu’il conviendrait de « mandater un cabinet de consultants pour évaluer lesimpacts d’un tel regroupement et pour proposer un modèle d’organisation.
Des questions se posent d’ores et déjà :
- le gain fonctionnel qui résulterait d’une telle réorganisation afin qu’elle ne soit pas perçue comme une réponse bureaucratique
- la DENC, refondue au sein du service unique, ne serait plus une direction de la Nouvelle-Calédonie, ce qui serait susceptible de poser des problèmes politiques et de gouvernance pour la mise en œuvre de la politique éducative
- la gestion des ressources humaines avec notamment des problèmes de règlementation du travail pourrait apparaître notamment sur le temps de travail différents des agents administratifs
- l’homologie de fonction serait à régler entre les différents chefs de service, chefs de division, directeurs etc...
- l’implantation physique sur plusieurs sites des services du vice-rectorat et de ceux de la DENC est considérée actuellement comme problématique.
La restructuration serait, sans aucun doute, mieux justifiée si elle s’accompagnait d’un regroupement dans un espace commun. Il n’est actuellement pas prévu dans les projets d’investissement immobiliers de la Nouvelle-Calédonie.
La chambre observe que proposer de supprimer des doublons administratifs ou de rassembler des services ne peut être considéré comme une réponse bureaucratique. Au-delà, la réponse de la collectivité montre qu’elle a saisi les multiples dimensions de cette réforme.
La chambre souhaite indiquer l’orientation générale qui est le regroupement des services. Certains services apparaissent, a priori, pouvoir être regroupés avec d’autres du fait du transfert. Les choix de réorganisation et les choix de gouvernance du vice-rectorat de la
Nouvelle-Calédonie restent à définir par le gouvernement. Un audit préalable pourrait être effectivement une méthode possible pour élaborer des scénarios. La chambre considère que les solutions quelles qu’elles soient devront être rapidement élaborées et mises en œuvre.
Recommandation n°2
La chambre recommande que soit rapidement mené le regroupement de la direction des enseignements de la Nouvelle-Calédonie au sein du vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie.
La gestion de l'enseignement privé
La division de l’enseignement privé (DEP) du service unique assure l’ensemble du pilotage du secteur privé primaire comme secondaire. Une partie des missions de ressources humaines que cette division effectue pour le secteur privé et notamment la solde, sont identiques à celles effectuées pour le secondaire public par la division du personnel et la division des rémunérations. Les missions de gestion de la carte scolaire de la division relèvent des provinces et de la direction des ressources humaines de la fonction publique de Nouvelle-Calédonie (DRHFPNC) pour le secteur primaire public. Elles sont mises en œuvre par la division de l’élève et de l’établissement (DIVEET) pour le secteur secondaire public. Aujourd’hui, des liens informels sont établis entre ces services. Mais une coordination plus formalisée serait nécessaire. La chambre considère que pour parer au risque d’une communication insuffisante entre ces services, la mise en œuvre d’une procédure de
coordination ou leur fusion serait souhaitable. Sur le plan de l’allocation des ressources, le regroupement des services exerçant des fonctions analogues tels que ceux des rémunérations ou ceux des concours permettrait par ailleurs d’optimiser les moyens.
Recommandation n°3
La chambre recommande qu’au sein de la direction générale des enseignements, lorsqu’ils exercent des fonctions identiques, les services de la division de l’enseignement privé soient coordonnés ou fusionnés avec ceux exerçant les mêmes missions pour le public.
La Nouvelle-Calédonie estime fondées ces orientations mais subordonne leur mise en œuvre à celle du regroupement DENC/vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie.
Les services administratifs des ressources humaines
Les modalités administratives de gestion des ressources humaines sont un enjeu d’efficience. Il convient d’y consacrer des moyens adaptés en évitant les gaspillages découlant des doublons ou des incohérences. Les enseignants du secteur secondaire public de
statut territorial représentent 665 personnes sur un total de 2 050 au bilan social 2014 du service unique. Les informations utiles à leur gestion statutaire sont transmises par la division du personnel à la DRHFPNC. Les décisions individuelles que la DRHFPNC prépare sont ensuite retransmises au service unique à destination de la division des rémunérations qui assure le calcul et la mise en paiement de la solde. Ce système peu efficient dédouble les services en charge de la gestion et est de ce fait plus coûteux en moyens. Il peut, par ailleurs, être source d’erreurs ou de pertes de temps. La paye des agents concernés étant liquidée sur des crédits d’Etat, il ne serait pas possible de transférer l’intégralité de la gestion des personnels concernés à la DRHFPNC.
La chambre considère qu’il serait souhaitable de concentrer au service unique la gestion des enseignants de statut territorial payés sur crédits d’Etat en MADGG.
En revanche, la gestion des personnels administratifs en poste dans les collèges et les lycées ressort naturellement à la DRHFPNC chargée de gérer les personnels de la Nouvelle-Calédonie. Ainsi les avis de vacances les concernant sont désormais publiés sur le site de la DRHFPNC. Une difficulté demeurera cependant tant que ces personnels seront payés en MADGG sur crédits d’Etat car cette fonction est une mission qui est exercée par le service unique. Ainsi, les personnels administratifs de l’éducation pourraient relever de la DRHFPNC.
Recommandation n°4
La chambre recommande que la gestion des ressources humaines de l’éducation, actuellement partagée entre la DRHFPNC et le service unique, soit, à terme regroupée à la DRHFPNC ou à l’organisme en charge de la gestion qui s’y substituerait s’agissant des personnels de services, médico-sociaux et de surveillance et au service unique s’agissant des personnels enseignants, de direction et d’éducation.
La Nouvelle-Calédonie agrée à ce diagnostic mais conditionne la mise en œuvre de la recommandation à celle du regroupement DENC/service unique.
Eclatement géographique
Pour des raisons historiques, les administrations calédoniennes de l’éducation sont aujourd’hui divisées en trois sites. La DENC est située place des Cocotiers (48 agents). La direction du service unique et certains services sont situés immeuble Flize en face du lycée Lapérouse (53 personnes). Enfin, les autres services occupent l’immeuble Dézarnaulds (86 personnes). L’éloignement géographique des services est de l’avis général des personnes rencontrées au cours de l’instruction du présent rapport une source de complications. Il contribue à la rareté des contacts entre la DENC, qui dispose de son propre site, et le service unique, éclaté sur 2 sites. La chambre recommande qu’une réflexion globale sur l’organisation immobilières des services soit menée par la Nouvelle-Calédonie afin que les services en charge de l’éducation puissent être éventuellement regroupés sur un même site. Cette fusion serait cohérente avec l’intégration des services de la DENC au sein du service unique. Elle pourrait être l’occasion de proposer aux provinces de rapprocher leurs services en charge de l’éducation avec ceux de la Nouvelle-Calédonie.
Recommandation n°5
La chambre recommande à la Nouvelle-Calédonie de regrouper les services en charge de l’éducation sur un seul site et de promouvoir à cette occasion une logique de mutualisation des moyens avec les provinces.
Le gouvernement considère ce regroupement immobilier comme souhaitable mais sous réserve du regroupement DENC/service unique et de la soutenabilité budgétaire du financement de cette opération.
Statut des collèges et lycées
En application de l’article 4 de la loi du pays du 28 décembre 2009 relative au transfert, la Nouvelle-Calédonie doit fixer les modalités d’organisation et de fonctionnement des établissements. La chambre constate que deux ans après le transfert, le statut des collèges et des lycées
n’a toujours pas abouti. Un projet relativement finalisé datant de novembre 2013 a été produit lors de l’instruction du présent rapport. Ce projet devrait rapidement être mené à son terme.
Rappel d’obligation juridique n°2
La chambre rappelle qu’en application de l’article 4 de la loi du pays n° 2009-09 du 28 décembre 2009, la Nouvelle-Calédonie doit arrêter un statut des établissements publics d’enseignement de la Nouvelle-Calédonie.
En réponse, le gouvernement a indiqué : « Ce projet, présenté au CESE, devrait être proposé au congrès très prochainement. ».
Action pédagogique
La direction des enseignements de Nouvelle-Calédonie (DENC) est essentiellement constituée d’un service de contrôle et d’action pédagogique pour le secteur primaire. Si elle est regroupée avec le service unique, ses services de contrôle pédagogique coexisteront avec ceux du second degré relevant du vice-rectorat. L’inspection pédagogique du second degré fait en effet partie des rares services non transférés du service unique et relève donc du vice-recteur. La chambre considère nécessaire un rapprochement entre ces deux services. Elle relève
qu’en métropole cette mission est dénommée « action pédagogique » et qu’elle est regroupée pour le primaire et le secondaire jusqu’au collège. Ceci est plus conforme à la réalité des missions du service. Juridiquement, elle est permise par la notion juridique de service unique grâce à laquelle il est possible de regrouper sous une même entité des services de la Nouvelle-Calédonie (premier degré) et ceux de l’Etat (secondaire).
Les zones de contrôle des secteurs primaire et secondaire devraient être harmonisées. La carte du contrôle pédagogique devrait être maillée par un réseau de circonscriptions d’inspection communes au premier et au second degrés. Le périmètre du service du contrôle pédagogique dans le secteur secondaire comprend la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et le territoire des îles Wallis et Futuna. Les inspecteurs académiques – inspecteurs pédagogiques régionaux (IA-IPR) d’histoire et géographie et d’éducation physique et sportive sont basés en Polynésie française. Les autres IA-IPR sont en résidence à Nouméa. Le service est organisé territorialement en cinq bassins en Nouvelle-Calédonie et par filière d’enseignement. Ces deux services sont donc organisés différemment. Cette situation est défavorable à une approche des enjeux éducatifs par zone. Or, en Nouvelle-Calédonie plus encore qu’ailleurs, chaque aire géographique se caractérise par des problématiques particulières. Un réagencement de la carte du contrôle pédagogique permettrait de renforcer le lien entre le secteur primaire et le secteur secondaire, l’un des points faibles du système éducatif calédonien. Le budget 2014 de la Nouvelle-Calédonie indique qu’une réflexion est en cours sur la mise en place de bassins de pilotage académique pour le secondaire.
La chambre estime donc que la fusion des directions devrait s’accompagner de celle des ressorts territoriaux d’action des services du primaire (sept circonscriptions) et du secondaire (cinq bassins).
Recommandation n°6
La chambre recommande à la Nouvelle-Calédonie d’étudier avec le ministère de l’éducation nationale la possibilité de limiter au territoire de la Nouvelle-Calédonie le périmètre d’action du service du contrôle pédagogique du secteur secondaire.
Recommandation n°7
La chambre recommande à la Nouvelle-Calédonie de coordonner les services d’action pédagogique du premier et du second degrés et d’harmoniser la carte des sept circonscriptions du premier degré et des cinq circonscriptions du second degré.
Suivi et administration des programmes
La Nouvelle-Calédonie est compétente pour les programmes du premier degré (article 22 de la loi organique, alinéa 28). En application du II-8° de l’article 21 et de l’article 38 de la loi organique, l’État continue d’être compétent sur les programmes du second degré.
Mais, la Nouvelle-Calédonie dirige désormais les services chargés de les mettre en œuvre. L’État intervient pour les programmes du second degré et pour la définition du socle commun qui est transversal entre le primaire et le secondaire jusqu’à la fin du collège.
En 2006, l’Etat a adopté le socle commun (décret du 11 juillet 2006). Il s’agit de l’ensemble de connaissances et de compétences qu’il est indispensable de maîtriser pour accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation, construire son avenir personnel et professionnel et réussir sa vie en société. Le socle commun s’acquiert de la maternelle à la fin du collège. Par le décret n°2013-682 du 24 juillet 2013, l’Etat a redéfini le planning des acquisitions du socle commun. Les cycles suivants vont être progressivement mis en place : cycle 1 englobant l’ensemble de l’école maternelle, cycle 2 allant du CP au CE2, cycle 3 pour le CM1, le CM2, la 6ème et cycle 4 couvrant la 5ème, la 4ème et la 3ème. La césure primaire secondaire est donc très largement atténuée par cette organisation pédagogique nouvelle dans laquelle la sixième est une classe d’adaptation qui clôt un cycle.
La Nouvelle-Calédonie doit assurer le suivi des programmes et des schémas pédagogiques métropolitains. Elle doit coordonner ses propres programmes, c'est-à-dire ceux du primaire, avec ceux du second degré. Elle doit également assurer la première phase du socle commun jusqu’à la fin du CM2 en assurant une continuité avec le collège. Alors qu’il a été appliqué par l’Etat en Nouvelle-Calédonie dans le secondaire dès 2007, le socle commun a été transposé par la Nouvelle-Calédonie dans le secteur du premier degré par la délibération n° 191 du 13 janvier 2012 portant organisation de l’enseignement primaire de la Nouvelle-Calédonie. Ce délai apparaît relativement long. Il serait judicieux, une fois la direction des enseignements regroupée avec le service unique, qu’un service en charge des programmes soit identifié dans l’organigramme de cette direction.
La Nouvelle-Calédonie considère en réponse que « cette recommandation devrait effectivement faire partie des objectifs à assigner à la mission de regroupement des services. Il s’agirait d’éviter des incohérences entre les programmes du premier degré déterminés par la Nouvelle-Calédonie, et ceux du second degré par l’Etat, de favoriser, en résumé, l’application d’un socle commun adapté à la Nouvelle-Calédonie prenant en compte les compétences de l’Etat et de la Nouvelle-Calédonie. Le décret n° 2015-372 du 31 mars 2015 relatif au socle commun de connaissances, de compétences et de culture nous impose une adaptation dans les 1er et 2nd degrés avant la rentrée de février 2017. »
Recommandation n°8
La chambre recommande qu’à l’issue du regroupement de la direction des enseignements, la Nouvelle-Calédonie crée une entité en charge des programmes au sein de la direction générale des enseignements.
Rappel d’obligation juridique n°3
La chambre rappelle qu’en application de l’alinéa II-8° de l’article 21 et de l’article 38 de la loi organique du 19 mars 1999 la Nouvelle-Calédonie doit suivre la réforme des programmes mise en œuvre par l’Etat et en assurer la transposition dans sa politique éducative.
Dans sa réponse le gouvernement a indiqué que la Nouvelle-Calédonie mettait désormais en œuvre cette obligation.
Suivi statistique
Des moyens
Avant le transfert, l’éclatement des responsabilités avait pour conséquence qu’aucun compte rendu centralisé primaire/secondaire n’était effectué. Le seul travail de synthèse était mené par l’ISEE environ tous les 5 ans. Ceci ne permettait pas d’analyser les moyens mis en œuvre et les pistes possibles de leur optimisation. Le transfert a donné à la Nouvelle-Calédonie le rôle de pilote du système éducatif.
Il convient que cette situation s’améliore car la politique de l’éducation représente environ 100 Mds F CFP de dépenses diverses principalement publiques. C’est la mission dont le financement pèse le plus lourd dans les finances publiques. La dépense indiquée pour l’Etat en 2010 par l’ISEE est de 51,6 Mds F CFP. Le montant communiqué pour 2013 par le vice-rectorat est de 50,5 Mds F CFP. Il est incomplet car il ne comprend pas les subventions versées dans le cadre des contrats de développement, ni la part « Education » des subventions de fonctionnement versées aux provinces et aux communes. On ne connait donc pas le montant effectif de la dépense d’éducation de l’Etat en Nouvelle-Calédonie.
Il en va de même des dépenses effectuées par les provinces et les communes. Or celles-ci sont d’un niveau très significatif. Une commune comme Canala dépense près de 100 MF CFP pour les transports scolaires. Le montant des dépenses d’internat des provinces sont importantes. L’imprécision des données ne permet pas d’actualiser les dépenses publiées par l’Isee en 2010. Cette situation dans laquelle il n’est pas possible de connaître la dépense totale et la dépense moyenne par élève par secteur d’enseignement et par acteur ou par région n’est pas satisfaisante.
Ceci empêche la chambre d’exercer l’une de ses principales missions qui est d’examiner l’économie des moyens d’une politique. La Nouvelle-Calédonie ne peut non plus effectuer de comparaisons en termes de ratio de dépenses. La gestion financière de la politique de l’éducation est privée d’une base fiable d’analyse et de décision. La chambre relève qu’à l’issue du transfert, la fonction statistique fait partie des compétences de la Nouvelle-Calédonie. A ce titre, elle doit se mettre en mesure de produire chaque année une présentation précise, détaillée et consolidée des dépenses de tous les acteurs en matière d’éducation.
Des ressources humaines
La publication d’un bilan social en 2013 par la direction générale des enseignements (vice-rectorat ou service unique) a initié un renforcement de l’information en matière de ressources humaines. Le document réalisé contient de nombreuses informations utiles à l’analyse de l’activité du service. Toutefois, il ne mentionne ni les instituteurs publics, ni les agents des services périscolaires (internats, cantines, bus, garderies) ni les non-enseignants des organismes privés, ni les personnels additionnels de statuts divers. En l’absence de suivi consolidé des moyens consacrés à l’éducation, on ne connait donc pas le nombre total des agents. Il est, en l’état, totalisé 6 105 emplois en 2014. Mais il manque trop d’emplois pour établir certains ratios tel par exemple le nombre d’agents des fonctions supports. Il conviendrait donc qu’un bilan statistique annuel détaillé soit réalisé ce qui nécessiterait une centralisation des informations dont le relais pourrait être le bassin.
Le gouvernement indique que « la création d’un haut-conseil de l’éducation et d’un observatoire de la réussite éducative afin d’accompagner la mise en œuvre du projet éducatif, pourrait contenir cette dimension statistique. »
Recommandation n°9
La chambre recommande à la Nouvelle-Calédonie de mettre en œuvre rapidement la fonction statistique centrale mesurant pour l’ensemble des collectivités la dépense intérieure d’éducation et les données sociales correspondant aux agents au service de l’éducation dans les différentes collectivités.
La situation des partenariats privés
La chambre observe que les contrats actuels réservent une place très limitée au suivi de la performance. Ils règlent le volume des moyens et les obligations de service mais ne fixent pas d’objectifs de performance aux signataires. Seule l’action du contrôle pédagogique apporte un regard sur la performance opérationnelle des enseignements privés.
La Nouvelle-Calédonie gère la carte scolaire du premier degré et du second degré du secteur privé. Elle verse aux trois enseignements privés le forfait d’externat, dont le calcul est basé sur des taux par catégorie d’élèves. Elle prend en charge également une partie des investissements par la garantie et le remboursement des emprunts des enseignements privés. Elle est responsable de la santé scolaire dans le secondaire. Elle n’est cependant pas le seul partenaire des enseignements privés.
Les provinces versent des subventions de fonctionnement aux enseignements privés selon des modalités et des priorités qu’elles définissent en toute autonomie. Le montant de ces aides est, a priori, significatif pour les organismes bénéficiaires. Pour la DDEC, elles représentaient 35 % des recettes de fonctionnement 2013. En dehors de tout cadrage réglementaire, le montant annuel de ces subventions de fonctionnement atteint plus de 3 Mds F CFP. Sur la période 2008-2011, les sommes consacrées par les trois provinces aux investissements immobiliers des trois directions privées (école, collège, lycée, restauration et internat scolaire) ont représenté 1 Md F CFP. Elles mettent en œuvre la santé scolaire dans le primaire par délégation de la Nouvelle-Calédonie (qui leur verse 32 MF CFP). Elles participent aux transports scolaires dont les élèves du privé peuvent aussi bénéficier. Elles attribuent des allocations et bourses scolaires aux élèves du privé dans les mêmes conditions que ceux du public. Ces allocations permettent de couvrir les dépenses alimentaires.
Depuis le transfert, l’Etat fixe le nombre de place au concours d’entrée à l’ENEP et en préside le jury. Il assure également le contrôle pédagogique du second degré privé. Il participe à la gestion statutaire des enseignants du secteur secondaire privé. Il intervient principalement en appui financier des collectivités en finançant la solde des enseignants (en MADGG), le forfait d’externat et diverses subventions dans le cadre des contrats de développement.
La fréquentation de l'enseignement privé est globalement en baisseLa DDEC est présente dans toutes les provinces, pour tous les niveaux, hormis en province des Îles pour les lycées. L’ASEE est présente dans les îles et en province Nord pour le premier degré et les collèges, mais pas en province Sud. Pour les lycées, cette direction est présente dans le Nord et en province Sud. La FELP dispose de 4 enseignants en province des Îles dans le premier degré, sinon elle n’est présente qu’en province Nord et seulement pour le premier degré et le collège. Sur la période 1999-2007, une baisse importante des effectifs d’élèves avait été constatée dans les Iles (22%) et dans le Nord (11%) au profit de la province Sud (+11%). Le mouvement de baisse s’est accentué entre 2009 et 2014, les effectifs privés passant de 19 600 à 18 200 élèves. La baisse de la fréquentation est un phénomène global mais affecte différemment chaque établissement de chaque enseignement privé. Un diagnostic devra pour cette raison préciser l’évolution de la fréquentation à un niveau plus fin.
Les personnels administratifs des enseignements privés sont des agents de droit privé. Les maîtres de l’ASEE sont également des agents de droit privé. Ils sont néanmoins, comme les autres enseignants, payés par la Nouvelle-Calédonie et financés en MADGG par l’Etat. Les autres enseignants de la DDEC et de la FELP, et de l’ASEE pour le secondaire, sont des agents de droit public régis par la loi du pays de 2007 ayant transposé la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 relative à la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat. En principe, l’ensemble des agents d’enseignement du privé ont le même niveau de rémunération que ceux du public. Les enseignants n’ont pas un plein temps garanti en droit mais il l’est dans la pratique. La division de l’enseignement privé calcule en effet ses moyens de manière à pouvoir attribuer un service complet à chaque enseignant. Le niveau de leur retraite est nettement inférieur à celui des enseignants du secteur public. Un régime de retraite additionnel a été créé par la loi de pays de 2007 précitée. Il permet d’atteindre environ les trois quarts du niveau de la retraite du secteur public. La situation de l’immobilier est mal connue dans le détail. Le montant des réparations à effectuer pour la seule DDEC était estimé par celle-ci à 8 Mds F CFP dans son livre blanc en 2005. La situation des autres établissements serait, de l’avis général, plus mauvaise qu’à la DDEC. La chambre observe incidemment que le total des recettes de subventions qui figurent dans les comptes des organismes privés pour 2013 est différent de celui issu des comptes de la Nouvelle-Calédonie. Au-delà de ces incertitudes de mesure, le système de financement apparaît complexe et insuffisamment cadré.
Recommandation n°10
La chambre recommande à la Nouvelle-Calédonie une refonte de l’environnement juridique des enseignements privés permettant de préserver leur activité, de cadrer leurs conditions de financement par l’ensemble des partenaires (Nouvelle-Calédonie, provinces et communes) et de préciser leurs objectifs de performance.
Le gouvernement a répondu qu’une « démarche dite de « contractualisation » avec les enseignements privés est en cours. ».
Rapports entre la Nouvelle-Calédonie et l'Etat
L'Etat et la Nouvelle-Calédonie sont convenus d’un dispositif de concertation sur les programmes qui reste à mettre en place. Les dispositifs de dotation de compensation pourraient semble-t-il être mieux coordonnés. Le système de mise à disposition globale et gratuite (MADGG) a permis une transition souple entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie. Le volume des moyens dont bénéficie la Nouvelle-Calédonie est depuis le transfert demeuré supérieur à celui qui découlerait de l’application des ratios métropolitains.
En application de l’alinéa IV de l’article 38 de la loi organique et de l’alinéa I 2° de son article 133, la Nouvelle-Calédonie doit être consultée pour avis par le haut-commissaire sur les programmes de l’enseignement du second degré. Cette procédure devrait être organisée par une convention.
Rappel d’obligation juridique n°4
La chambre rappelle à la Nouvelle-Calédonie qu’en application de l’article 201-2 de la loi organique et de l’article 12 de la loi de pays du 28 décembre 2009, une convention fixant les modalités de consultation de la Nouvelle-Calédonie par l’Etat sur les programmes de l’enseignement du second degré doit être élaborée.
Dans sa réponse, le gouvernement a indiqué que « cette convention n’a fait l’objet d’aucun travail pour l’instant. Pour qu’elle débouche sur une application concrète, il conviendrait qu’une organisation ad hoc se mette en place au vice-rectorat. ».
En application du principe de la compensation des transferts de compétence fixé par l’article 55 de la loi organique, l’Etat compense les charges transférées. Il verse donc à la Nouvelle-Calédonie une compensation financière dénommée dotation globale de compensation. Les deux articles 55 et 55-1 prévoyaient qu’un décret soit pris pour fixer ces modalités d’actualisation.L’Etat a pris le décret n°2010-1087 du 14 septembre 2010 relatif aux modalités des transferts de compétences au bénéfice de la Nouvelle-Calédonie et des provinces de la Nouvelle-Calédonie. Son article 9 prévoit que le montant de la compensation de fonctionnement et celui de la compensation d’investissement sont constatés par un arrêté interministériel. Il semble que la coordination entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie pour la mise en œuvre de ce dispositif soit parfois hésitante. La publication en mai 2014 du montant définitif des compensations pour 2012 apparaît tardive. L’arrêté constatant le montant des compensations 2012 a été publié le 28 mai 2014. Aucun autre arrêté n’a été pris depuis ce qui a pour conséquence que les montants 2013 et 2014 n’ont pas été constatés contrairement aux dispositions du décret de 2010. La direction générale des enseignements (vice-rectorat ou service unique) indique qu’il est difficile d’anticiper les revalorisations des compensations ce qui complique la préparation annuelle du budget. La coordination devrait donc être renforcée.
La chambre estime regrettable ces hésitations pour ce qui concerne une question peu complexe sur le fond et importante sur le plan financier.Sur les deux premiers exercices depuis le transfert, les dépenses de fonctionnement de la Nouvelle-Calédonie dans le périmètre financé par la dotation de compensation ont été supérieures de 50,7 MF CFP aux sommes reçues. Celles financées par dotation de compensation pour l’investissement ont été inférieures de 113,6 MF CFP. Au total, en 2012 et 2013, la Nouvelle-Calédonie a dépensé 62,9 MF CFP de moins que les dotations qu’elle a reçues. L’idée que la Nouvelle-Calédonie serait perdante à la dotation globale de compensation ne pourrait être recevable que si on estimait la dotation initiale sous-évaluée. Le niveau de la dotation d’investissement a été calculé selon une méthode plus généreuse à la demande de la Nouvelle-Calédonie. Il ne semble pas aujourd’hui qu’il existe des arguments nouveaux pour remettre en cause le niveau initial des dotations.
Les personnels mis à disposition en MADGG
Dans ce système, les moyens ne sont pas fixés au moment du transfert puis indexés comme c’est le cas pour les dotations de compensation. Ils évoluent chaque année en fonction des demandes de la Nouvelle-Calédonie. De plus, la période de MADGG n’est pas bornée dans le temps. Le dispositif est souple et évolutif. Chaque année le ministère de l’éducation nationale fixe les moyens de la Nouvelle-Calédonie. Afin de déterminer le volume des moyens mis en œuvre, un dialogue de gestion est tenu entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie. Celle-ci détermine ses besoins pour une année dès le début de l’année N-1. Elle sollicite ensuite du ministère de l’éducation nationale les moyens qui lui sont nécessaires. Les moyens mis à disposition sont formés exclusivement des personnels. Ils relèvent de trois programmes de l’Etat 27 : le programme 139 (enseignement privé du premier et du second degrés), le programme 141 (enseignement public du second degré) et le programme 230 (Vie de l’élève).
Le premier programme 139 finance la solde des enseignants du secteur privé du premier et du second degrés. Il est négocié sous la forme d’une enveloppe d’heures du second degré. Ce terme technique correspond à des équivalents temps plein. Par exemple, pour 2014 le volume global des moyens permanents attribué est de 29 122 heures second degré ce qui correspond à 519 personnes physiques dans le premier degré et 957 dans le second degré. Il est complété par une enveloppe pour les remplacements (1 400 heures) et par une enveloppe pour les actions pédagogiques spécifiques (135 heures). Une fois attribué le volume total d’heures, les enveloppes propres à chacun des enseignements privés leurs sont notifiées.
Le programme 141 finance la solde des enseignants et personnels assimilés (les documentalistes par exemple) ainsi que les personnels de direction du secteur public secondaire. Ils représentent 2 224 agents en 2014. Ces moyens attribués sont notifiés à chaque établissement, pour ce qui concerne les effectifs enseignants, sous la forme d’une dotation horaire globale. Le chef d’établissement dispose ainsi du volume de ses moyens enseignants pour organiser les divisions ou classes pour la rentrée scolaire.
Le programme 230 rassemble des personnels d’éducation, médico-sociaux, de surveillance et de service (ATOS et assimilés). Il compte 778 agents en 2014.
Ce dispositif a permis une transition sans rupture entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie et ne soulève pas d’observation particulière de la chambre sur le plan opérationnel. En revanche, en termes de performance, ces crédits devraient faire l’objet d’un pilotage renforcé.Le rapport H/E (nombre d’heures par élève) est par exemple en moyenne de 1,30, alors qu’il n’est que de 1,19 pour la moyenne métropolitaine (rentrée 2011). Les collèges calédoniens sont donc globalement mieux dotés en heures d’enseignement que les collèges métropolitains. Sur la période 2009-2014, les effectifs ont augmenté de près de 1% alors que le nombre d’élèves a diminué de 1%. Financièrement, les dépenses de personnels sont passées de 41,9 Mds F CFP en 2009 à 44,1 Mds F CFP en 2014.
Sur longue période, la progression du nombre d’emplois dans le second degré public a été très significative. Les effectifs d’élèves ont augmenté de 48% alors que les emplois ont progressé de près de 90%.
L’État ne définit pas des plafonds de dépenses pour les moyens en MADGG mais uniquement des plafonds d’emplois par programme. En effet, la Nouvelle-Calédonie n’étant pas un budget opérationnel de programme (BOP) mais une unité opérationnelle (UO), ses plafonds d’ETPT de programme ne sont pas assortis d’un plafond de masse salariale. Cette situation donne de la souplesse. Mais elle est également une source de rigidité car les plafonds d’emplois sont répartis entre catégories d’emplois qui ne sont pas interchangeables. Un agent A autorisé dans le programme 230 ne pourra pas être remplacé par 1,5 agent B du même programme.
Actuellement les personnels gérés en MADGG relèvent de trois situations possibles : les cadres territoriaux de la Nouvelle-Calédonie et assimilés, les cadres État non soumis à séjour et les cadres État soumis à séjour. Les agents relevant d’un cadre territorial n’ont pas vocation à rester en MADGG. A terme, leur gestion relèvera exclusivement de la Nouvelle-Calédonie. Il convient donc d’envisager une sortie du dispositif de la MADGG pour ces agents.
La chambre relève que c’est à juste titre que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie se déclare « attaché à une sélection qualitative des personnels mis à sa disposition. C’est là une dimension décisive de l’effectivité du transfert de compétence ». Dans ce cadre, la chambre estime que la Nouvelle-Calédonie doit tracer des perspectives pour chacune des catégories de personnels mis à disposition. La question se pose différemment selon que l’on considère les enseignants et les personnels de direction et d’éducation d’une part, les autres personnels en MADGG d’autre part.
En 2012, sur 1 707 enseignants titulaires, les cadres État soumis à séjour représentent 35,1 % (599 agents) contre 43,1% 8 ans plus tôt. D’une part, cette diminution provient de la résorption de l’auxiliariat. Aux termes de l’article 8 de la convention du 18 octobre 2011 portant sur la MADGG : « pour pourvoir aux emplois vacants, le gouvernement définit annuellement le nombre de postes qu'il souhaite réserver à la Fonction Publique de la Nouvelle-Calédonie dans les concours externes et internes ouverts par l'État. Ce recrutement concrétise la mise en œuvre des « concours nationaux territorialisés » en application des dispositions de l’article 59-1 de la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie ». Cette délibération permettra d’organiser des concours et des titularisations de maîtres auxiliaires jusqu’en 2015. D’autre part, on constate une progression du nombre de réussites des néo-calédoniens aux concours nationaux. Ainsi, sur 24 postes ouverts au recrutement en mathématiques en 2014, seuls deux n’ont pas été obtenus par des candidats calédoniens. Actuellement le mouvement extraterritorial permet un renouvellement du corps et des apports de compétences de pratiques extérieures. Une forte diminution de la proportion de personnels soumis à séjour aurait des effets peu souhaitables en premier lieu desquels la rigidité de l’offre éducative et la coupure avec les dynamiques professionnelles métropolitaines. Pour préserver ces effets (flexibilité et apports externes aux pratiques) la Nouvelle-Calédonie devrait, selon une estimation citée par l’audit Pro Ed de 2009, conserver un volant d’environ 30% de fonctionnaires enseignants soumis à séjour. Ce chiffre est issu de travaux du gouvernement sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences effectués lors de la préparation du transfert. Cette solution est d’autant plus souhaitable que la Nouvelle-Calédonie dispose d’un privilège majeur dans le mouvement extraterritorial qui consiste à pouvoir choisir les professeurs demandant à être mutés en Nouvelle-Calédonie au lieu que ces derniers soient mutés aux points. Le fait que les mutations en Nouvelle-Calédonie (mouvement extraterritorial) ne s’effectuent pas « aux points » uniquement comme c’est le cas pour les affectations sur le reste du territoire de la République a été validé par le conseil d’Etat par un arrêt du 19 septembre 2014.